vendredi 6 mars 2020

"La ville en dessous." recit de ma première descente dans les galeries souteraines de Paris.


La ville en dessous.







Un soir de juillet, j'attends chez moi, mes affaires sont prêtes. J'ai mis dans mon sac à dos de collège tout ce dont je pourrais avoir besoin : à manger, à boire, de quoi avoir chaud, s'éclairer et se couvrir la tête. J'attends avec une pointe d'impatience, il est presque 22h et Alexis n'est pas là.
Je retourne encore aux toilettes par prudence. Ça sonne, c'est lui. On vérifie les sacs. Pistaches, eau, alcool en cocktail épicé qu'il a préparé. J'aurai à porter deux bières, de la piémontaise, du tabac, un pull, des piles...

C'est Alexis qui m'a parlé des catacombes.
J'avais déjà vu quelques photos sur internet qui m'avaient intriguée et rappeler la spéléologie.
Plus tard, chez lui, j'ai vu un agrandissement du plan du réseau accroché au mur. Puis c'est en rangeant mon placard où sont toutes mes chaussures qu'il m'a dit en voyant mes bottes en caoutchouc que j'ai depuis l'internat à St Étienne «  et bah, t'es bonne pour descendre aux catas... »

Ce soir on y va, j'ai envie de voir, de savoir, de sentir par moi même.
Il y a quelques jours, lors d'un pic-nique géant avec des amis devant la tour Eiffel,
le sujet est revenu. Une jeune femme à qui je suis présentée demande à Alexis :
- « Alors? Quand est-ce qu'on retourne aux catas? » Alexis me regarde et dit
« Justement on en parlait, faudrait voir à faire ça prochainement, Barbara voulait y aller aussi. » Quelques jours plus tard, un message circule sur internet comme une mise en garde ayant pour but de décourager : « N'y aller pas si vous avez peur de vous salir, de vous mouiller... »
joint une liste de matériel asses longue comme pour un départ en camping ou bien un kit de survie.

Nous somme fin prêts et devons rejoindre ses amis qui nous attendent déjà. L'air enjoué nous prenons le métro avec nos sacs à dos chargés. J'ai déjà mes bottes aux pieds, mon jean noir par dessus les font passées inaperçues. Comme souvent quand je me fait guidée, je ne me souviens pas très bien du chemin, premier changement à nation puis vers le sud, deuxième changement quelques stations plus loin puis nous sortons du métro et marchons dans la ville qui ne dort pas encore. La nuit est déjà bien présente, paisible soir d'été.




Alexis me dit que l'on va bientôt arriver à un pont qui surplombe une vieille ligne de chemin de fer. La petite ceinture : faisant le tour de Paris cette ligne servait autrefois de transport de marchandises et de voyageurs mais désaffectée elle est redevenue complètement sauvage depuis les années 1990. Il y a un mur pas très haut à franchir. Alexis passe en premier et saisis mon sac pour m'aider. Je jette un coup d'œil autour, pas de voiture, personne. Pour me hisser je saisis la pierre, passe ma jambe de l'autre coté, à califourchon je vois l'obscurité de l'autre coté. Il est plus bas que moi, ce qui me fais supposer de la hauteur du sol. Je dois me laisser glisser sur le ventre sans savoir quand mes pieds toucheront le sol. Premier roulement de tambour dans mon cœur. Ça y est, j'y suis.
Il faut longer la corniche pour accéder aux marches qui mènent à un lieu où la végétation a repris possession d'une construction humaine, certainement une veille gare. Dans l'air du soir, beaucoup de senteurs boisée se révèlent: les mûriers, les ronces, le lierre. Le long des voies, les rails sentent le métal, les pierres la poussière humide.

C'est un lieu qu'il connaît bien, chez lui me dit il. Nous marchons sur les lattes en bois vers un tunnel plus loin ou il semble que l'obscurité devient compacte. Il me montre des petites lumières dans la profondeur de la nuit en disant qu'il y a des gens qui entrent ou sortent mais je ne vois rien que deux points blancs au loin. Après avoir franchie l'entrée du tunnel, l'obscurité se fait plus intense. Avant de poursuivre nous faisons une halte pour que Alexis se change.

Il enfile ses bottes, ses cuissardes, il me donne une lampe frontale que je place sur mon bonnet, et une autre dite « Mag-Light » que j'accroche à mon jean. Les sacs refermés sur le dos nous pouvons y aller. Encore quelques mettre de marche sur les lattes du chemin de fer. Ces lattes sont justement espacées pour que je puisse placer mes pieds dessus à petits pas. Une fois le rythme pris c'est plus facile d'avancer dans le noir.

Alexis me dit « C'est là! » en me montrant une cavité basse, il m'invite à y aller la première. Je lui souris avant de me courber pour y aller. Je pénètre dans le souterrain obscure où le sol est terreux, je regarde la galerie à ma droite et vois l'éclat des lampes au fond, des voix qui se rapprochent. Un couple arrive vers moi, je m'écarte pour les laisser passer en les saluant d'un bonsoir. Alexis est derrière moi; il me dit « C'est par là » en montrant le seul chemin possible : tout droit. Ensuite nous prenons un autre couloir sur la gauche, la galerie maçonnées éclairée par la lampe frontale a une couleur gris bleu. Je vois une plaque avec le nom d'une rue mais aussi des dates gravées dans la pierre : 1850, 1870, 1780. Les murs recouverts de graffitis superposés me donnent une idée du nombre de visiteurs qui ont voulu laisser une trace de leurs passages.

Un groupe arrive dans notre direction, ils ont les baskets brillantes d'humidité. Alexis les appelle les pieds mouillés. Un garçon métisse parle avec un cheveu sur la langue, il mène le groupe vers la sortie. Alexis est surpris de les voir partir au moment où nous entrons, ils échangent quelques mots sur les salles que le groupe a vu et les gens qu'ils ont croisés.
Chacun reprend sa route, le métisse suivi de deux jeunes filles habillées en noir dont l'une porte un tee shirt où est imprimé le A de Anarchie, tandis qu'un autre jeune homme ferme la marche.
Nous continuons à marcher tout droit, sur les cotés nous passons devant plusieurs galeries qui croisent celle dans laquelle nous progressons. J'avance en jetant quelques coup d'œil. Alexis me dit «  n'hésites pas à poser des questions » mais pour l'instant, je reste sans voix, il me faut du temps, je préfère observer d'abord.

Alexis regarde son plan asses rarement car il connaît bien le chemin. Nous marchons jusqu'à ce que le sol soit plus humide. Nous sommes à un passage appelé « Banga », le bruit des bottes dans l'eau ressemble à un clapotis mais bientôt mes pas deviennent incertains, il faut veiller à ne pas glisser sur les rochers. L'eau arrive à mi mollet et pour ne pas se mouiller il faut désormais longer les parois, poser les pieds sur les pierres qui affleurent la surface et faire de grandes enjambées. La largeur du couloir permet justement de poser les pieds de part et d'autre du ruisseau qui sillonne sous mes jambes. D'où le nom du lieu en référence à une publicité pour une célèbre marque de boisson aromatisée du même nom.

Par endroit, même en faisant de grands pas, si je marche trop vite ou sans soulever mes pieds suffisamment cela fait des vagues et l'eau se met à mouiller mon pantalon retroussé à hauteur du genoux. J'essaye de passer sur le coté au plus près du mur et de suivre Alexis devant moi. Trop tard. J'ai fait un pas dont l'écart trop large à fait rentrer de l'eau dans l'une de mes bottes et bientôt voilà que l'autre se remplie aussi. C'est frais et surprenant mais il faut poursuivre car nous sommes attendus.

Après ce passage, la marche sur terrain sec reprend un rythme plus soutenu. Sur le coté, en bas du mur, une petite rigole a été creusée, elle est pleine d'eau. Plus loin je découvre un puits creusé à même le sol dont l'eau a été troublée par notre arrivée. En pointant la lumière vers la cavité, je ne parviens pas à voir à plus d'un mettre.

Nous arrivons prés d'une salle appelée « le château ». Nous y faisons une halte et rejoignons ceux qui sont à l'intérieur : deux couples et un jeune homme qui roule. C'est le bon moment pour ouvrir une bière et fumer une cigarette. J'écoute les conversations, Alexis et le jeune homme parlent des salles qu'ils connaissent, des entrées praticables, de celles qui ont fermées. Les couples plient bagages et reprennent la route. Nous aussi, nous sommes attendus et il reste du chemin. Avant de partir je me rapproche du château construit au fond de la salle. Depuis mon arrivée je le regardais ainsi que les têtes de gargouilles sculptées dans la pierre. C'est un travail soigné. Je place une bougie prés du château ce qui lui donne plus de profondeur et permet d'apprécier plus nettement le relief de la pierre. C'est une construction conséquente. Sa taille respectable me fait penser à une forteresse médiévale. Bel ouvrage.


Après avoir pris le temps de s'embrasser un instant, nous reprenons notre chemin. Le rendez vous a été donné dans une salle précise. Alexis espère que ses amis y seront encore, il faut presser le pas. Les kilomètres de galeries se succèdent, parfois le plafond plus bas oblige Alexis à se courber en avant. Je fais comme lui puis, peu à peu je me redresse et m'aperçois que le plafond est juste à quelques centimètres de ma tête. Pour une fois que ma taille semble adaptée, cela me fait plaisir de ne pas être handicapé par mon corps. C'est comme si pour la première fois je trouvais un endroit où ma taille est un atout.

Cela fait déjà presque deux heures que nous marchons et je me fais la remarque que je serais bien incapable de trouver mon chemin pour rejoindre la sortie. Mon téléphone étant éteint, il m'est impossible de savoir l'heure avec précision et donc de me situer dans le temps. D'ailleurs Alexis m'a prévenu, la question tabou à ne jamais poser quand on est « en bas » c'est « quelle heure est il? »

Il m' est assez difficile de ma remémorer les souvenirs de cette descente chronologiquement. C'est comme si les souvenirs, eux aussi, avaient garder l'emprunte du trajet labyrinthique. Je me souviens avoir croisé un groupe peu après la salle du château, d'un pas pressé avec une destination précise, plusieurs jeunes gens suivaient les instructions de leur guide. Celui ci menait la visite à la manière d'un guide touristique, avec son plan à la main. Le groupe qu'il accompagne semble d'ailleurs être assez novice. Nous les croisons à plusieurs reprise, parfois à quelques couloirs à écouter les commentaires ,parfois devant nous ouvrant la marche avec plus de lumière. Alexis pense que nous allons peu-être au même endroit. Je crois comprendre que la coutume locale est plutôt ouverte au contact pourtant le guide de ce groupe ne semble pas vraiment dans son éléments ici. Il échange de façon brève avec Alexis sur le trajet qui mène à la salle recherchée puis très vite il dit «  bon allez on reprend la marche! » et s'en va suivi de ses touristes. Nous les suivons de toute manière car nous allons dans la même direction.

Après plusieurs minutes de marche, longeant différents couloirs et galeries maçonnées, nous arrivons à la salle qui devait être le lieu de rendez vous. Lorsque nous y entrons il n'y a personne, juste une petite bougie posée le long de la paroi chancelle encore et rend compte de l'espace de la pièce. Cette pièce s'appelle « la salle des bites », pourtant seul un vestige brisé, taillé dans la roche du mur, indique que cette salle disposait autrefois de phallus sculptés dans la paroi. L'inclinaison, la hauteur et les proportions de celle dont il ne reste plus que la base, indique sa possible utilisation.

Nos amis ont certainement du rejoindre le deuxième lieu de rendez-vous : le cabinet minéralogique.
J'imagine alors le bureau de Jules Verne, avec posés sur des étagères les pierres taillées, sculptées de quartz, granit, améthyste dont la coupe de la pierre brute permet de découvrir le scintillement et l'éclat des facettes. J'imagine des minéraux précieux, des lampe à sel à la lumière chaude rose orange...

Ne traînons pas, nous sommes déjà bien en retard, nous dépassons le groupe de touristes qui s'est arrêté pour écouter les explications du guide. Finalement du lièvre ou de la tortue, nous avions l'air moins pressés mais avons gardé une allure constante malgré nos nombreuses explorations.


J'entends une grosse voix au fond du couloir. Joyeusement quelqu'un accourt dans notre direction. Il crie « Simonka! Ouvres une bouteille! Je les ai trouver! » Il est même plus que joyeux, parlant fort et prenant d'un coup tout le volume sonore que peux contenir le couloir. Raphaël s'écrie « Je savais que c'était toi, j'ai entendu un mec parler comme ça, je me suis dit « je connais ce mec ». Son débit de parole tranche avec la sérénité qui régnait avant son arrivé. Il dit qu'ils ont bu une bouteille de vodka à deux en nous attendant et que c'est de la faute d'Alexis, qu'il est resté à l'heure brésilienne et qu'il arrive toujours avec 4 h de retard. Il me prend à témoin et me demande de confirmer. Il n'y a pas de place pour faire entendre ma petite voix alors je souris bêtement comme pour dire que je suis désolée. Raphaël se met à jouer Alexis expliquant chaque pierre, chaque recoin à la manière d'un archéologue.

Il me fait rire avec son entrain communicatif. Au bout d'un moment il reprend son souffle pour me faire la bise et se présenter. Alexis confus de son retard tente de dire qu'on est rentré tard et qu'on a du passé dans la salle des bites peu après leur départ. Mais Raphaël fais beaucoup de bruit sur un autre rythme, le redbull et la vodka lui ont donné une énergie considérable. Il avance à grand pas en criant « Simonka ouvres une bouteille! » lorsque j'arrive dans la salle je reconnais tout d'abord la jeune fille que j'avais rencontré au pic nique du champs de mars. Elle me fait la bise en souriant. Le jeune homme qui roulait au château est là aussi, seul dans un coin, il roule.

C'est le moment de poser les sacs, fumer une petite cigarette, sortir à boire et trinquer ensemble. Des tapis de sols en mousse laissés là par d'autres visiteurs nous permettent de nous asseoir au sec, en s'isolant du froid humide de la pierre. Alexis sort son cocktail épicé au jus de fruit, Raphaël demande si c'est buvable, il connaît déjà bien mieux que moi les expériences corsées au piment qu'Alexis confond parfois avec du paprika...Simonka qui ne s'est pas fait prier pour goûter détache sa bouche du goulot pour dire « c'est bon » d'un air étonné et en boit à nouveau une grande gorgée avant de ma la tendre. C'est vrai que c'est bon.

Je repense aux racines que j'ai vu traversant la roche pour pendre aux dessus de nos têtes, les petits fils entrelacés dans lesquels des gouttelettes translucides sont suspendues. Je repense à cette salle, basse remplie de colonnades serrées à perte de vue. Pas évident de se remémorer le trajet déjà, surtout quand Raphaël parle plus fort que la musique. Plusieurs groupes nous ont rejoint dans la salle. Un groupe de jeunes hommes entrent en riant, ils saluent chacun en se présentant. L'un d'eux à un appareil qui fait de la musique, tout comme le mec qui roule au fond mais le volume ne permettait qu'à lui d'en profiter, le nouvel appareil et la voix de Raphaël ne lui permettait peu être plus d'en profiter.

Simonka revient des toilettes et nous préviens qu'il y a eu des fumigènes, et moi qui venait de dire à Alexis que je voulais y aller...mais il faut voir ça! On y va, Alexis m'accompagne, à trois pas de l'entrée c'est déjà le brouillard « ils ont mis des fumis dans le cabi-bis » Le cabinet bis est une salle qui a été creusée plus récemment juste à coté du cabinet minéralogique. J'avance dans l'épaisse fumée, heureusement ça ne sent pas mauvais. Le faisceau de lumière de ma lampe ne va pas plus loin qu'un mettre, elle est trop faible pour pénétrer l'épaisse atmosphère. Mes pas se font incertains, j'écarte les bras pour le localiser par rapport aux parois quand ma main rencontre celle d'Alexis, j'entends son rire et son écho. À cet instant magique on voudrait bien figé le temps par un baiser. Alexis me dit « tu vas trouver une galerie à droite bouchée par du remblai au fond » j'y vais seule, marche dans le couloir qui tourne et trouve une galerie bouchée au fond, j'y avance...je me sent bien seule à cet instant. Le silence me laisse même entendre mon souffle. Je me presse de trouver un petit coin et me rhabille aussitôt ma vessie vidée. Alexis n'est plus visible, au son des voix qui me parviennent droit devant je revient sur le chemin que j'avais emprunté. En se rapprochant de la salle, le chemin devient plus tortillard, à gauche, à droite, le chemin est étroit entre les blocs de roche et semble faire des zigzags.


Le retour dans la salle est marqué par le bruit des nombreuses personnes présentes, fumée et lumières. Alexis n'est pas là...devant moi Raphaël parle aux touristes venus avec leur guide que nous avons croisés tout à l'heure. Il leur parle des marches. Dans le cabinet qui est une petite salle rectangulaire s'élève un escalier, il monte jusqu'au plafond. Quand on regarde attentivement, on remarque que les marches sont trop petites pour qu'on puisse les gravir. Nombreux furent ceux qui se sont casser la gueule, lui même s'était bien vautré nous dit-il. D'ailleurs c'est à la suite d'une chute que deux des marches ont été endommagées, depuis elles ont été refaites et c'est pour cela qu'elles ont l'air moins émoussées. Sur les marches se trouve un crane humain et un os, différentes bougies sont posées. Je vois Alexis en allumer une, c'est bon de le revoir.

En l'attendant j'avais entamé la conversation avec Simonka qui aime bien mes bottes. Elle me dit qu'elle travaille en montant des expositions dans une galerie d'art. Elle espère que les artistes qu'elle expose vont marcher, que son expo attirera le public. Plus tard, Raphaël se rapproche, Simona lui tend sa cigarette, elle lui ressert un verre en l'appelant « Pratcho » ou « Pradcho » qui voudrait dire gros cochon en bulgare. Un des mecs présents dit qu'il est allé en Ukraine et s'en suis une conversation sur les origines de chacun, les endroits où l'on est passé. C'est la coutume ici, souvent lorsque les gens se rencontrent en bas ils se demandent « Par où t'es entré toi, vous allez dans quelle salle? »

Dans le coin il y a toujours le mec qui roule. J'ai bien envie de fumer aussi, je lui dit que j'aurai du ramener en conséquence mais étant ma première descente, je n'ai pas pensé à tout. Il me tend sa main repliée sur le bout des doigts et me dit « tu veux rouler? » J'accepte et commence à effriter dans ma main. Alexis viens vers moi et commence et discuter avec le rouleur. Mais Simona et Raphaël plient bagage, ils veulent bouger, aller dans la salle où ils ont prévu de dormir. Je me dépêche de rouler remercie l'inconnu au crane rasé pour le geste de partage. Je propose à Alexis qui accepte quelques lattes quand Raphaël presse qu'il est temps de bouger. Alexis échange encore quelques mots et dix minutes s'écoulent quand Raphaël et Simonka nous crient qu'ils s'en vont. « Attendez on arrive » Nous plions vite nos sacs et suivons le groupe qui s'est additionné du mec en combinaison étanche qui est allé en Ukraine.

Nous revoilà parti à marcher à la file indienne dans les couloirs, Raphaël devant donne le rythme de la marche. Pour le suivre il ne faut pas traîner. Il répète le nom de la salle où il se dirige « Anschluss! Nous on va à Anschluss! » répond-il aux jeunes hommes qui lui demandent « vous allez où? » L'un d'eux dit  « Mais? nous aussi on y va » pourtant lorsque nous les croisons, ils marchent à l'opposée du chemin que nous prenons. Raphaël avance vite, c'est amusant de se suivre ainsi, de marcher dans les pas du précédent. J'essaye de maintenir le même écart avec la personne devant moi. Les garçons échangent quelques mots se demandent si l'entrée est toujours praticable à tel endroit, se racontent comment ils sont sortis en pleine rue devant une épicerie. Raphaël décide d'accélérer le rythme en se mettant à courir. Nous le suivons sur plusieurs couloirs en essayant de ne pas perdre de vue les lampes qui brillent au fond du tunnel, lorsqu'il y a plusieurs virages successifs. Je me repère aux sons des rires de Simonka et du jeune homme qui cour derrière Raphaël. Parfois il s'arrête pour vérifier qu'on suis toujours. À la première halte nous sommes toujours ensemble. À peine arrivés Raphaël se remet à courir et nous de le suivre.

Le groupe qui semblait perdu marche désormais derrière nous. Les couloirs se suivent et ne se ressemblent pas. Au rythme du footing, il devient plus compliqué de contempler les différentes constructions de pierre et pourtant je contemple le paysage qui s'offre à moi. Le fait de marcher réchauffe vite et bientôt je sens que j'aurai besoin de trouver encore un petit coin. Alexis qui marche derrière moi me montre une galerie bouchée, j'y vais vite et quand je ressort j'entends la voix de Simona qui appelle « Alexis? » Je réponds « on est là » pourtant Alexis n'est plus là. Si, le voilà. Il ressort lui aussi d'un autre petit coin.

Simona et le jeune homme en combinaison nous attendent au prochain croisement. Je leur demande : « Raphaël n'est pas avec vous? »- « ba non, on s'est arrêté pour aller aux toilettes et il a continué. » Simona semble soulagée par la présence d'Alexis, elle le connais mieux qu'elle ne connaît le jeune homme ou moi même, cela doit la rassurer, surtout qu'il connaît les lieu mieux que nous et surtout, il est muni d'un plan. Alexis et le mec en combinaison pensent qu'il faut aller par là, donc on y va. La marche en file indienne reprend son rythme de croisière. À un croisement, un groupe nous dit « votre guide vous attend à Anschluss ». Rien de bien nouveaux pour nous mais c'est gentil de transmettre le message.

Nous marchons encore, la file s'allonge et les groupes se mélangent. Je me retrouve en tête de file marchant toujours tout droit. Derrière moi un des mecs qui était avec son groupe au cabinet minéralogique me suit, incertain. À un moment il me demande « Mais on va où là? » - « Tout droit. Tu veux aller où? Il n'y a que ce chemin... » il me dit « Mais t'es pas la fille qui descend pour la première fois? » Je sens son inquiétude grandir et cela me fait rire. Je lui répond « oui » en riant aux éclats. Il se retourne et repars dans l'autre sens à la rencontre d'Alexis en disant: «  Tu la connais cette fille? Je sais pas ce qu'elle a, elle arrête pas de rigoler »
Finalement Alexis réussi à le rassurer un peu, quand un de ses amis arrive le chercher. Ils repartent ensemble dans la direction opposée et nous repartons dans la notre.

Lorsque nous arrivons enfin à Anschluss, nous y trouvons Raphaël qui s'est déjà aménager son hamac en travers, le deuxième sera pour Simonka si j'ai bien compris. Un groupe se prépare à partir peu de temps après notre arrivée et nous commençons à déballer nos affaires pour manger un morceau. La piémontaise que j'ai préparé nous réconforte et vu la quantité, chacun peux piocher dedans autant qu'il veux, les sacs seront plus légers à présents délestés de presque tout les liquides, il nous restera quelques bières pour le petit-déjeuner. À Anschluss il y a une échelle qui monte jusqu'à une plaque d'égout, le seul endroit où il est possible de se servir d'un téléphone portable. Je décide d'y monter pour envoyer un message à ma cousine venue d'Ukraine pour qu'elle ne s'inquiète pas de mon absence.

Alexis constate qu'il n'y a plus de pitons disponible pour fixer son hamac dans cette salle, il me propose alors de venir avec lui à la recherche d'un lieu pour nous servir de refuge, le bunker allemand. Le lieu n'est pas très accueillant, par endroit le sol est recouvert de bois émietté, vestige de l'ancien plancher qui recouvrait le sol. Par endroit les salles sont encore muni de toilettes, de pancarte ou d'écriture indiquant « Rauchen verboten » interdiction de fumer. C'est dans un espèce de couloir qu'Alexis trouvera un piton dans la roche pour y accrocher son hamac deux places. Nous réunissons nos affaires dans un coin et nous faufilons l'un contre l'autre. Blottie dans ses bras, je n'ai pas de mal à trouver rapidement le sommeil, j'ai la sensation d'avoir passer la nuit à marcher, je suppose qu'il doit être prés de six heure du matin. Nous dormons quelques heures et malgré les courants d'airs, nous n'avons pas eu froid grâce à la couverture de survie.

Nous allons rejoindre Raphaël et Simonka à Anschluss, le mec en combi est toujours là lui aussi, il a dormi à même la pierre et a mal partout; Il roule un joint pour se réveiller. Les mecs commencent à parler du chemin à prendre pour retrouver la sortie, par ici c'est fermé, Ravage, le mec en combi nous dit qu'il a les clefs du cimetière du Montparnasse mais que pour y aller il ne faut pas avoir peur de se mouiller jusqu'à la taille, non merci. Un autre chemin nous ferais passer par les réseaux de Mont-souris, connus pour être dangereux à cause du risque d'affaissement du ciel de carrière, la plafond étant déjà tombé par endroit. C'est pourtant vers ce secteur que ce trouve une magnifique salle disposant d'une maquette de construction inca après un autre lieu qui s'appelle le bout du monde et qui porte bien son nom.

Nous sommes restés prés de 18h en bas. Nous avons bien cru que nous resterions bloqués à un moment. La plaque donnant sur l'extérieur ne s'ouvrait pas. C'était bloqué alors que nous venions de monter je ne sais pas combien d'échelles et de paliers pour arriver en haut. Finalement Raphaël a forcé avec son dos de mec costaud ( il y avait quelque chose de coincé sur un coté, mais il a fini par le déboîter) avant de ressortir prés d'un parc dont la fontaine a été mon oasis. Il était 18h, il faisait bien chaud dehors, nous étions tous tout salles, on s'est lavé brièvement à la fontaine et nous sommes allés nous sécher au soleil dans l'herbe du jardin du Luxembourg.

prototype de cartes de tarot de Marseille, Anouchka 2016

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