La ville
en dessous.
Un
soir de juillet, j'attends chez moi, mes affaires sont prêtes. J'ai
mis dans mon sac à dos de collège tout ce dont je pourrais avoir
besoin : à manger, à boire, de quoi avoir chaud, s'éclairer et se
couvrir la tête. J'attends avec une pointe d'impatience, il est
presque 22h et Alexis n'est pas là.
Je
retourne encore aux toilettes par prudence. Ça sonne, c'est lui. On
vérifie les sacs. Pistaches, eau, alcool en cocktail épicé qu'il a
préparé. J'aurai à porter deux bières, de la piémontaise, du
tabac, un pull, des piles...
C'est
Alexis qui m'a parlé des catacombes.
J'avais
déjà vu quelques photos sur internet qui m'avaient intriguée et
rappeler la spéléologie.
Plus
tard, chez lui, j'ai vu un agrandissement du plan du réseau accroché
au mur. Puis c'est en rangeant mon placard où sont toutes mes
chaussures qu'il m'a dit en voyant mes bottes en caoutchouc que j'ai
depuis l'internat à St Étienne « et bah, t'es bonne pour
descendre aux catas... »
Ce
soir on y va, j'ai envie de voir, de savoir, de sentir par moi même.
Il
y a quelques jours, lors d'un pic-nique géant avec des amis devant
la tour Eiffel,
le
sujet est revenu. Une jeune femme à qui je suis présentée demande
à Alexis :
- « Alors?
Quand est-ce qu'on retourne aux catas? » Alexis me regarde et
dit
« Justement
on en parlait, faudrait voir à faire ça prochainement, Barbara
voulait y aller aussi. » Quelques jours plus tard, un message
circule sur internet comme une mise en garde ayant pour but de
décourager : « N'y aller pas si vous avez peur de vous salir,
de vous mouiller... »
joint
une liste de matériel asses longue comme pour un départ en camping
ou bien un kit de survie.
Nous
somme fin prêts et devons rejoindre ses amis qui nous attendent
déjà. L'air enjoué nous prenons le métro avec nos sacs à dos
chargés. J'ai déjà mes bottes aux pieds, mon jean noir par dessus
les font passées inaperçues. Comme souvent quand je me fait guidée,
je ne me souviens pas très bien du chemin, premier changement à
nation puis vers le sud, deuxième changement quelques stations plus
loin puis nous sortons du métro et marchons dans la ville qui ne
dort pas encore. La nuit est déjà bien présente, paisible soir
d'été.
Alexis
me dit que l'on va bientôt arriver à un pont qui surplombe une
vieille ligne de chemin de fer. La petite ceinture : faisant le tour
de Paris cette ligne servait autrefois de transport de marchandises
et de voyageurs mais désaffectée elle est redevenue complètement
sauvage depuis les années 1990. Il y a un mur pas très haut à
franchir. Alexis passe en premier et saisis mon sac pour m'aider. Je
jette un coup d'œil autour, pas de voiture, personne. Pour me hisser
je saisis la pierre, passe ma jambe de l'autre coté, à califourchon
je vois l'obscurité de l'autre coté. Il est plus bas que moi, ce
qui me fais supposer de la hauteur du sol. Je dois me laisser glisser
sur le ventre sans savoir quand mes pieds toucheront le sol. Premier
roulement de tambour dans mon cœur. Ça y est, j'y suis.
Il
faut longer la corniche pour accéder aux marches qui mènent à un
lieu où la végétation a repris possession d'une construction
humaine, certainement une veille gare. Dans l'air du soir, beaucoup
de senteurs boisée se révèlent: les mûriers, les ronces, le
lierre. Le long des voies, les rails sentent le métal, les pierres
la poussière humide.
C'est
un lieu qu'il connaît bien, chez lui me dit il. Nous marchons sur les
lattes en bois vers un tunnel plus loin ou il semble que l'obscurité
devient compacte. Il me montre des petites lumières dans la
profondeur de la nuit en disant qu'il y a des gens qui entrent ou
sortent mais je ne vois rien que deux points blancs au loin. Après
avoir franchie l'entrée du tunnel, l'obscurité se fait plus
intense. Avant de poursuivre nous faisons une halte pour que Alexis
se change.
Il
enfile ses bottes, ses cuissardes, il me donne une lampe frontale que
je place sur mon bonnet, et une autre dite « Mag-Light »
que j'accroche à mon jean. Les sacs refermés sur le dos nous
pouvons y aller. Encore quelques mettre de marche sur les lattes du
chemin de fer. Ces lattes sont justement espacées pour que je puisse
placer mes pieds dessus à petits pas. Une fois le rythme pris c'est
plus facile d'avancer dans le noir.
Alexis
me dit « C'est là! » en me montrant une cavité basse,
il m'invite à y aller la première. Je lui souris avant de me
courber pour y aller. Je pénètre dans le souterrain obscure où le
sol est terreux, je regarde la galerie à ma droite et vois l'éclat
des lampes au fond, des voix qui se rapprochent. Un couple arrive
vers moi, je m'écarte pour les laisser passer en les saluant d'un
bonsoir. Alexis est derrière moi; il me dit « C'est par là »
en montrant le seul chemin possible : tout droit. Ensuite nous
prenons un autre couloir sur la gauche, la galerie maçonnées
éclairée par la lampe frontale a une couleur gris bleu. Je vois une
plaque avec le nom d'une rue mais aussi des dates gravées dans la
pierre : 1850, 1870, 1780. Les murs recouverts de graffitis
superposés me donnent une idée du nombre de visiteurs qui ont voulu
laisser une trace de leurs passages.
Un
groupe arrive dans notre direction, ils ont les baskets brillantes
d'humidité. Alexis les appelle les pieds mouillés. Un garçon
métisse parle avec un cheveu sur la langue, il mène le groupe vers
la sortie. Alexis est surpris de les voir partir au moment où nous
entrons, ils échangent quelques mots sur les salles que le groupe a
vu et les gens qu'ils ont croisés.
Chacun
reprend sa route, le métisse suivi de deux jeunes filles habillées
en noir dont l'une porte un tee shirt où est imprimé le A de
Anarchie, tandis qu'un autre jeune homme ferme la marche.
Nous
continuons à marcher tout droit, sur les cotés nous passons devant
plusieurs galeries qui croisent celle dans laquelle nous progressons.
J'avance en jetant quelques coup d'œil. Alexis me dit «
n'hésites pas à poser des questions » mais pour l'instant, je
reste sans voix, il me faut du temps, je préfère observer d'abord.
Alexis
regarde son plan asses rarement car il connaît bien le chemin. Nous
marchons jusqu'à ce que le sol soit plus humide. Nous sommes à un
passage appelé « Banga », le bruit des bottes dans l'eau
ressemble à un clapotis mais bientôt mes pas deviennent incertains,
il faut veiller à ne pas glisser sur les rochers. L'eau arrive à mi
mollet et pour ne pas se mouiller il faut désormais longer les
parois, poser les pieds sur les pierres qui affleurent la surface et
faire de grandes enjambées. La largeur du couloir permet justement
de poser les pieds de part et d'autre du ruisseau qui sillonne sous
mes jambes. D'où le nom du lieu en référence à une publicité
pour une célèbre marque de boisson aromatisée du même nom.
Par
endroit, même en faisant de grands pas, si je marche trop vite ou
sans soulever mes pieds suffisamment cela fait des vagues et l'eau se
met à mouiller mon pantalon retroussé à hauteur du genoux.
J'essaye de passer sur le coté au plus près du mur et de suivre
Alexis devant moi. Trop tard. J'ai fait un pas dont l'écart trop
large à fait rentrer de l'eau dans l'une de mes bottes et bientôt
voilà que l'autre se remplie aussi. C'est frais et surprenant mais
il faut poursuivre car nous sommes attendus.
Après
ce passage, la marche sur terrain sec reprend un rythme plus soutenu.
Sur le coté, en bas du mur, une petite rigole a été creusée, elle
est pleine d'eau. Plus loin je découvre un puits creusé à même le
sol dont l'eau a été troublée par notre arrivée. En pointant la
lumière vers la cavité, je ne parviens pas à voir à plus d'un
mettre.
Nous
arrivons prés d'une salle appelée « le château ». Nous
y faisons une halte et rejoignons ceux qui sont à l'intérieur :
deux couples et un jeune homme qui roule. C'est le bon moment pour
ouvrir une bière et fumer une cigarette. J'écoute les
conversations, Alexis et le jeune homme parlent des salles qu'ils
connaissent, des entrées praticables, de celles qui ont fermées.
Les couples plient bagages et reprennent la route. Nous aussi, nous
sommes attendus et il reste du chemin. Avant de partir je me
rapproche du château construit au fond de la salle. Depuis mon
arrivée je le regardais ainsi que les têtes de gargouilles
sculptées dans la pierre. C'est un travail soigné. Je place une
bougie prés du château ce qui lui donne plus de profondeur et
permet d'apprécier plus nettement le relief de la pierre. C'est une
construction conséquente. Sa taille respectable me fait penser à
une forteresse médiévale. Bel ouvrage.
Après
avoir pris le temps de s'embrasser un instant, nous reprenons notre
chemin. Le rendez vous a été donné dans une salle précise. Alexis
espère que ses amis y seront encore, il faut presser le pas. Les
kilomètres de galeries se succèdent, parfois le plafond plus bas
oblige Alexis à se courber en avant. Je fais comme lui puis, peu à
peu je me redresse et m'aperçois que le plafond est juste à
quelques centimètres de ma tête. Pour une fois que ma taille semble
adaptée, cela me fait plaisir de ne pas être handicapé par mon
corps. C'est comme si pour la première fois je trouvais un endroit
où ma taille est un atout.
Cela
fait déjà presque deux heures que nous marchons et je me fais la
remarque que je serais bien incapable de trouver mon chemin pour
rejoindre la sortie. Mon téléphone étant éteint, il m'est
impossible de savoir l'heure avec précision et donc de me situer
dans le temps. D'ailleurs Alexis m'a prévenu, la question tabou à
ne jamais poser quand on est « en bas » c'est « quelle
heure est il? »
Il
m' est assez difficile de ma remémorer les souvenirs de cette
descente chronologiquement. C'est comme si les souvenirs, eux aussi,
avaient garder l'emprunte du trajet labyrinthique. Je me souviens
avoir croisé un groupe peu après la salle du château, d'un pas
pressé avec une destination précise, plusieurs jeunes gens
suivaient les instructions de leur guide. Celui ci menait la visite à
la manière d'un guide touristique, avec son plan à la main. Le
groupe qu'il accompagne semble d'ailleurs être assez novice. Nous
les croisons à plusieurs reprise, parfois à quelques couloirs à
écouter les commentaires ,parfois devant nous ouvrant la marche avec
plus de lumière. Alexis pense que nous allons peu-être au même
endroit. Je crois comprendre que la coutume locale est plutôt
ouverte au contact pourtant le guide de ce groupe ne semble pas
vraiment dans son éléments ici. Il échange de façon brève avec
Alexis sur le trajet qui mène à la salle recherchée puis très
vite il dit « bon allez on reprend la marche! » et s'en
va suivi de ses touristes. Nous les suivons de toute manière car
nous allons dans la même direction.
Après
plusieurs minutes de marche, longeant différents couloirs et
galeries maçonnées, nous arrivons à la salle qui devait être le
lieu de rendez vous. Lorsque nous y entrons il n'y a personne, juste
une petite bougie posée le long de la paroi chancelle encore et rend
compte de l'espace de la pièce. Cette pièce s'appelle « la
salle des bites », pourtant seul un vestige brisé, taillé
dans la roche du mur, indique que cette salle disposait autrefois de
phallus sculptés dans la paroi. L'inclinaison, la hauteur et les
proportions de celle dont il ne reste plus que la base, indique sa
possible utilisation.
Nos
amis ont certainement du rejoindre le deuxième lieu de rendez-vous :
le cabinet minéralogique.
J'imagine
alors le bureau de Jules Verne, avec posés sur des étagères les
pierres taillées, sculptées de quartz, granit, améthyste dont la
coupe de la pierre brute permet de découvrir le scintillement et
l'éclat des facettes. J'imagine des minéraux précieux, des lampe à
sel à la lumière chaude rose orange...
Ne traînons pas, nous sommes déjà bien en retard, nous dépassons le
groupe de touristes qui s'est arrêté pour écouter les explications
du guide. Finalement du lièvre ou de la tortue, nous avions l'air
moins pressés mais avons gardé une allure constante malgré nos
nombreuses explorations.
J'entends
une grosse voix au fond du couloir. Joyeusement quelqu'un accourt
dans notre direction. Il crie « Simonka! Ouvres une bouteille!
Je les ai trouver! » Il est même plus que joyeux, parlant fort
et prenant d'un coup tout le volume sonore que peux contenir le
couloir. Raphaël s'écrie « Je savais que c'était toi, j'ai
entendu un mec parler comme ça, je me suis dit « je connais ce
mec ». Son débit de parole tranche avec la sérénité qui
régnait avant son arrivé. Il dit qu'ils ont bu une bouteille de
vodka à deux en nous attendant et que c'est de la faute d'Alexis,
qu'il est resté à l'heure brésilienne et qu'il arrive toujours
avec 4 h de retard. Il me prend à témoin et me demande de
confirmer. Il n'y a pas de place pour faire entendre ma petite voix
alors je souris bêtement comme pour dire que je suis désolée.
Raphaël se met à jouer Alexis expliquant chaque pierre, chaque
recoin à la manière d'un archéologue.
Il
me fait rire avec son entrain communicatif. Au bout d'un moment il
reprend son souffle pour me faire la bise et se présenter. Alexis
confus de son retard tente de dire qu'on est rentré tard et qu'on a
du passé dans la salle des bites peu après leur départ. Mais
Raphaël fais beaucoup de bruit sur un autre rythme, le redbull
et la vodka lui ont donné une énergie considérable. Il avance à
grand pas en criant « Simonka ouvres une bouteille! »
lorsque j'arrive dans la salle je reconnais tout d'abord la jeune
fille que j'avais rencontré au pic nique du champs de mars. Elle me
fait la bise en souriant. Le jeune homme qui roulait au château est
là aussi, seul dans un coin, il roule.
C'est
le moment de poser les sacs, fumer une petite cigarette, sortir à
boire et trinquer ensemble. Des tapis de sols en mousse laissés là
par d'autres visiteurs nous permettent de nous asseoir au sec, en
s'isolant du froid humide de la pierre. Alexis sort son cocktail
épicé au jus de fruit, Raphaël demande si c'est buvable, il connaît déjà bien mieux que moi les expériences corsées au piment
qu'Alexis confond parfois avec du paprika...Simonka qui ne s'est pas
fait prier pour goûter détache sa bouche du goulot pour dire « c'est
bon » d'un air étonné et en boit à nouveau une grande gorgée
avant de ma la tendre. C'est vrai que c'est bon.
Je
repense aux racines que j'ai vu traversant la roche pour pendre aux
dessus de nos têtes, les petits fils entrelacés dans lesquels des
gouttelettes translucides sont suspendues. Je repense à cette salle,
basse remplie de colonnades serrées à perte de vue. Pas évident de
se remémorer le trajet déjà, surtout quand Raphaël parle plus
fort que la musique. Plusieurs groupes nous ont rejoint dans la
salle. Un groupe de jeunes hommes entrent en riant, ils saluent
chacun en se présentant. L'un d'eux à un appareil qui fait de la
musique, tout comme le mec qui roule au fond mais le volume ne
permettait qu'à lui d'en profiter, le nouvel appareil et la voix de
Raphaël ne lui permettait peu être plus d'en profiter.
Simonka
revient des toilettes et nous préviens qu'il y a eu des fumigènes,
et moi qui venait de dire à Alexis que je voulais y aller...mais il
faut voir ça! On y va, Alexis m'accompagne, à trois pas de l'entrée
c'est déjà le brouillard « ils ont mis des fumis dans le
cabi-bis » Le cabinet bis est une salle qui a été creusée
plus récemment juste à coté du cabinet minéralogique. J'avance
dans l'épaisse fumée, heureusement ça ne sent pas mauvais. Le
faisceau de lumière de ma lampe ne va pas plus loin qu'un mettre,
elle est trop faible pour pénétrer l'épaisse atmosphère. Mes pas
se font incertains, j'écarte les bras pour le localiser par rapport
aux parois quand ma main rencontre celle d'Alexis, j'entends son rire
et son écho. À cet instant magique on voudrait bien figé le temps
par un baiser. Alexis me dit « tu vas trouver une galerie à
droite bouchée par du remblai au fond » j'y vais seule, marche
dans le couloir qui tourne et trouve une galerie bouchée au fond,
j'y avance...je me sent bien seule à cet instant. Le silence me
laisse même entendre mon souffle. Je me presse de trouver un petit
coin et me rhabille aussitôt ma vessie vidée. Alexis n'est plus visible, au son des voix qui me
parviennent droit devant je revient sur le chemin que j'avais
emprunté. En se rapprochant de la salle, le chemin devient plus
tortillard, à gauche, à droite, le chemin est étroit entre les
blocs de roche et semble faire des zigzags.
Le
retour dans la salle est marqué par le bruit des nombreuses
personnes présentes, fumée et lumières. Alexis n'est pas
là...devant moi Raphaël parle aux touristes venus avec leur guide
que nous avons croisés tout à l'heure. Il leur parle des marches.
Dans le cabinet qui est une petite salle rectangulaire s'élève un
escalier, il monte jusqu'au plafond. Quand on regarde attentivement,
on remarque que les marches sont trop petites pour qu'on puisse les
gravir. Nombreux furent ceux qui se sont casser la gueule, lui même
s'était bien vautré nous dit-il. D'ailleurs c'est à la suite d'une
chute que deux des marches ont été endommagées, depuis elles ont
été refaites et c'est pour cela qu'elles ont l'air moins émoussées.
Sur les marches se trouve un crane humain et un os, différentes
bougies sont posées. Je vois Alexis en allumer une, c'est bon de le
revoir.
En
l'attendant j'avais entamé la conversation avec Simonka qui aime
bien mes bottes. Elle me dit qu'elle travaille en montant des
expositions dans une galerie d'art. Elle espère que les artistes
qu'elle expose vont marcher, que son expo attirera le public. Plus
tard, Raphaël se rapproche, Simona lui tend sa cigarette, elle lui
ressert un verre en l'appelant « Pratcho » ou « Pradcho »
qui voudrait dire gros cochon en bulgare. Un des mecs présents dit
qu'il est allé en Ukraine et s'en suis une conversation sur les
origines de chacun, les endroits où l'on est passé. C'est la
coutume ici, souvent lorsque les gens se rencontrent en bas ils se
demandent « Par où t'es entré toi, vous allez dans quelle
salle? »
Dans
le coin il y a toujours le mec qui roule. J'ai bien envie de fumer
aussi, je lui dit que j'aurai du ramener en conséquence mais étant
ma première descente, je n'ai pas pensé à tout. Il me tend sa main
repliée sur le bout des doigts et me dit « tu veux rouler? »
J'accepte et commence à effriter dans ma main. Alexis viens vers moi
et commence et discuter avec le rouleur. Mais Simona et Raphaël
plient bagage, ils veulent bouger, aller dans la salle où ils ont
prévu de dormir. Je me dépêche de rouler remercie l'inconnu au
crane rasé pour le geste de partage. Je propose à Alexis qui
accepte quelques lattes quand Raphaël presse qu'il est temps de
bouger. Alexis échange encore quelques mots et dix minutes
s'écoulent quand Raphaël et Simonka nous crient qu'ils s'en vont.
« Attendez on arrive » Nous plions vite nos sacs et
suivons le groupe qui s'est additionné du mec en combinaison étanche
qui est allé en Ukraine.
Nous
revoilà parti à marcher à la file indienne dans les couloirs,
Raphaël devant donne le rythme de la marche. Pour le suivre il ne
faut pas traîner. Il répète le nom de la salle où il se dirige
« Anschluss! Nous on va à Anschluss! » répond-il aux
jeunes hommes qui lui demandent « vous allez où? » L'un
d'eux dit « Mais? nous aussi on y va » pourtant
lorsque nous les croisons, ils marchent à l'opposée du chemin que
nous prenons. Raphaël avance vite, c'est amusant de se suivre ainsi,
de marcher dans les pas du précédent. J'essaye de maintenir le même
écart avec la personne devant moi. Les garçons échangent quelques
mots se demandent si l'entrée est toujours praticable à tel
endroit, se racontent comment ils sont sortis en pleine rue devant
une épicerie. Raphaël décide d'accélérer le rythme en se mettant
à courir. Nous le suivons sur plusieurs couloirs en essayant de ne
pas perdre de vue les lampes qui brillent au fond du tunnel,
lorsqu'il y a plusieurs virages successifs. Je me repère aux sons
des rires de Simonka et du jeune homme qui cour derrière Raphaël.
Parfois il s'arrête pour vérifier qu'on suis toujours. À la
première halte nous sommes toujours ensemble. À peine arrivés
Raphaël se remet à courir et nous de le suivre.
Le
groupe qui semblait perdu marche désormais derrière nous. Les
couloirs se suivent et ne se ressemblent pas. Au rythme du footing,
il devient plus compliqué de contempler les différentes
constructions de pierre et pourtant je contemple le paysage qui
s'offre à moi. Le fait de marcher réchauffe vite et bientôt je
sens que j'aurai besoin de trouver encore un petit coin. Alexis qui
marche derrière moi me montre une galerie bouchée, j'y vais vite et
quand je ressort j'entends la voix de Simona qui appelle « Alexis? »
Je réponds « on est là » pourtant Alexis n'est plus là.
Si, le voilà. Il ressort lui aussi d'un autre petit coin.
Simona
et le jeune homme en combinaison nous attendent au prochain
croisement. Je leur demande : « Raphaël n'est pas avec
vous? »- « ba non, on s'est arrêté pour aller aux
toilettes et il a continué. » Simona semble soulagée par la
présence d'Alexis, elle le connais mieux qu'elle ne connaît le jeune
homme ou moi même, cela doit la rassurer, surtout qu'il connaît les
lieu mieux que nous et surtout, il est muni d'un plan. Alexis et le
mec en combinaison pensent qu'il faut aller par là, donc on y va. La
marche en file indienne reprend son rythme de croisière. À un
croisement, un groupe nous dit « votre guide vous attend à
Anschluss ». Rien de bien nouveaux pour nous mais c'est gentil
de transmettre le message.
Nous
marchons encore, la file s'allonge et les groupes se mélangent. Je
me retrouve en tête de file marchant toujours tout droit. Derrière
moi un des mecs qui était avec son groupe au cabinet minéralogique
me suit, incertain. À un moment il me demande « Mais on va où
là? » - « Tout droit. Tu veux aller où? Il n'y a
que ce chemin... » il me dit « Mais t'es pas la fille qui
descend pour la première fois? » Je sens son inquiétude
grandir et cela me fait rire. Je lui répond « oui » en
riant aux éclats. Il se retourne et repars dans l'autre sens à la
rencontre d'Alexis en disant: « Tu la connais cette fille? Je
sais pas ce qu'elle a, elle arrête pas de rigoler »
Finalement
Alexis réussi à le rassurer un peu, quand un de ses amis arrive le
chercher. Ils repartent ensemble dans la direction opposée et nous
repartons dans la notre.
Lorsque
nous arrivons enfin à Anschluss, nous y trouvons Raphaël qui s'est
déjà aménager son hamac en travers, le deuxième sera pour Simonka
si j'ai bien compris. Un groupe se prépare à partir peu de temps
après notre arrivée et nous commençons à déballer nos affaires
pour manger un morceau. La piémontaise que j'ai préparé nous
réconforte et vu la quantité, chacun peux piocher dedans autant
qu'il veux, les sacs seront plus légers à présents délestés de
presque tout les liquides, il nous restera quelques bières pour le
petit-déjeuner. À Anschluss il y a une échelle qui monte jusqu'à
une plaque d'égout, le seul endroit où il est possible de se servir
d'un téléphone portable. Je décide d'y monter pour envoyer un
message à ma cousine venue d'Ukraine pour qu'elle ne s'inquiète pas
de mon absence.
Alexis
constate qu'il n'y a plus de pitons disponible pour fixer son hamac
dans cette salle, il me propose alors de venir avec lui à la
recherche d'un lieu pour nous servir de refuge, le bunker allemand.
Le lieu n'est pas très accueillant, par endroit le sol est recouvert
de bois émietté, vestige de l'ancien plancher qui recouvrait le
sol. Par endroit les salles sont encore muni de toilettes, de
pancarte ou d'écriture indiquant « Rauchen verboten »
interdiction de fumer. C'est dans un espèce de couloir qu'Alexis
trouvera un piton dans la roche pour y accrocher son hamac deux
places. Nous réunissons nos affaires dans un coin et nous faufilons
l'un contre l'autre. Blottie dans ses bras, je n'ai pas de mal à
trouver rapidement le sommeil, j'ai la sensation d'avoir passer la
nuit à marcher, je suppose qu'il doit être prés de six heure du
matin. Nous dormons quelques heures et malgré les courants d'airs,
nous n'avons pas eu froid grâce à la couverture de survie.
Nous
allons rejoindre Raphaël et Simonka à Anschluss, le mec en combi
est toujours là lui aussi, il a dormi à même la pierre et a mal
partout; Il roule un joint pour se réveiller. Les mecs commencent à
parler du chemin à prendre pour retrouver la sortie, par ici c'est
fermé, Ravage, le mec en combi nous dit qu'il a les clefs du
cimetière du Montparnasse mais que pour y aller il ne faut pas avoir
peur de se mouiller jusqu'à la taille, non merci. Un autre chemin
nous ferais passer par les réseaux de Mont-souris, connus pour être
dangereux à cause du risque d'affaissement du ciel de carrière, la
plafond étant déjà tombé par endroit. C'est pourtant vers ce
secteur que ce trouve une magnifique salle disposant d'une maquette
de construction inca après un autre lieu qui s'appelle le bout du
monde et qui porte bien son nom.
Nous
sommes restés prés de 18h en bas. Nous avons bien cru que nous
resterions bloqués à un moment. La plaque donnant sur l'extérieur
ne s'ouvrait pas. C'était bloqué alors que nous venions de monter
je ne sais pas combien d'échelles et de paliers pour arriver en
haut. Finalement Raphaël a forcé avec son dos de mec costaud ( il y
avait quelque chose de coincé sur un coté, mais il a fini par le
déboîter) avant de ressortir prés d'un parc dont la fontaine a été
mon oasis. Il était 18h, il faisait bien chaud dehors, nous étions
tous tout salles, on s'est lavé brièvement à la fontaine et nous
sommes allés nous sécher au soleil dans l'herbe du jardin du
Luxembourg.
prototype de cartes de tarot de Marseille, Anouchka 2016 |
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